Résumé: Le clown blanc n'a plus le goût du rire...
Une très sombre et poignante histoire de vengeance dessinée par un nouvel auteur dont le talent est indéniable.
C
’est un soir d’hiver que Clown trouva Zoé… Il l’adopta…
Dans Clown, seule une voix off, économe de son verbe, vient soutenir le dessin, suffisamment rythmé et éloquent, sans qu’il soit nécessaire d’ajouter de dialogues. Le plus souvent, une phrase inachevée par planche, parfois deux, exceptionnellement trois, et il n’en faut pas plus. À chacun de se construire sa bande son, à base de pas qui crissent dans la neige, de gazouillis d’oiseaux au cours d’une partie de pêche, de poisson qui frit, pour illustrer les moments champêtres et les jours heureux.
Mais, bientôt, le son de la pluie qui tombe dru s’installe, accompagné de celui de la foule urbaine, des rires d’ivrognes, des cris et enfin du tonnerre. Le lecteur a perdu le sourire lorsque l’histoire a basculé. Dans un premier temps, porté par les sonorités qui s’échappent de cet album muet, il le referme la tête embrouillée de cris étouffés et de coups sourds. Encore immergé dans le drame dont il a été spectateur, peu de chance qu’il en ressorte plus loquace que le chauve massif au nez rouge, si son entourage succombe à l’idée saugrenue de lui adresser la parole. Preuve que la lecture du récit proposé par Le Hir fils et père, pour rapide qu’elle fût, risque de mettre du temps à se décanter dans son esprit et que la narration a touché là où ils le souhaitaient.
Néanmoins, tout n’est pas parfait (doit-on regretter la perfection et son revers, celui qui tue l’émotion ?). Sur le plan graphique, l’image du Calvin de Bill Watterson affublé de couettes et d'une chevelure de feu jouant le rôle de la petite Zoé assaille le moins regardant des amateurs. L’idée, incongrue, qu’un Léon la came maquillé par Guillaume Griffon, expert en mâchoires façon requins, campe celui de l’ignoble Willy s’invite elle aussi. Pourtant, l’ambiance – plus que le charme – opère au point de se retrouver accablé, vouté comme le cheval fourbu de la couverture. Clown a quelque chose d’envoutant et finalement d’assez unique qui laisse entre deux sentiments : l’envie de s’y plonger à nouveau pour en décortiquer les mécanismes après s’être laissé porter quarante-quatre planches durant et, au contraire, la crainte qu’une relecture finisse par nous hanter durablement. Tout ça, sur la base d’une histoire qui, finalement, brille par sa simplicité. Fort.
La preview
Les avis
Lartpenseur
Le 17/04/2024 à 22:08:28
Avis concernant les deux 1ers tomes :
Un mélange de douceur et de noirceur avec la quantité minimal de dialogue et des dessins qui se font au contraire très parlants.
Un savoureux mélange qui transmet aisément les émotions de la BD.
Un auteur unique.
Erik67
Le 01/09/2020 à 17:47:14
Le Hir arrive à faire naître de l'émotion avec une histoire d'une simplicité absolue. On ne pourra pas dire que l'originalité sera présente. L'album sera d'ailleurs très vite lu en raison de nombreuses scènes contemplatives. Il s'agit bien d'une bd muette hormis la narration.
Cependant, j'ai beaucoup apprécié cette fable du clown reclus qui découvre la joie de vivre grâce à l'émergence d'une petite fille dans sa vie. Les choses vont singulièrement se compliquer à l'âge adulte. Les clowns m'ont toujours fait peur car derrière le visage d'un farceur peut se cacher d'autres réalités plus sombres pour peu qu'elles naissent du malheur et du désespoir.
C'est le premier album d'un auteur plein de promesse et d'espoir. Le 4 étoiles est décerné à titre d'encouragement car c'est mérité. Il faudra juste un peu plus complexifier les choses à l'avenir sous peine de ne pas assez contenter le lecteur.
vacom
Le 08/05/2012 à 21:11:13
C’est un soir d’hiver que Clown trouva Zoé. Il l’adopta.
L’introduction est avare de mots et la suite l’est tout autant. D’ailleurs, l’histoire a déjà été racontée mille fois : l’amour entre un père et sa fille, mis à mal par la cruauté du monde. Peu d’originalité à rechercher dans le fond. Ici, l’art est dans la manière ; beaucoup de choses passent par le dessin et les couleurs, par des compositions silencieuses qui en disent plus que de longues tirades enflammées. Les personnages vivent, s’attachent à vous par de petits gestes, des impressions fugaces, des regards qui font mouche.
Un beau récit, tout en simplicité, porté par des ambiances envoûtantes.