Résumé: Ceux qui me restent parlait de mémoire à reconstituer, avec Ceux qui me touchent, un nouveau duo père/fille partagent cette fois un autre processus de (re)création.
La naissance d’Élisa a bouleversé la vie d’Aude et Fabien qui ont aménagé leur temps de travail afin d’éviter de passer un salaire en nounou. Elle, à l’hôpital public ; lui, dans un abattoir porcin. Un soir, pour endormir sa fille, Fabien et Elisa inventent leur propre histoire fantastique, avec un étonnant bestiaire.Le lendemain, au sortir de sa journée de travail, un accident l’amène à croiser le regard d’un cerf et le renvoie au conte qu’ils ont créé. Quelques jours après, c’est un cochon tatoué qui intime un rapprochement entre la vie et leurs imaginaires. Bien que conscient que ce ne sont que des coïncidences, Fabien y puise la force de changer sa trajectoire. Il quitte l’abattoir en volant le cochon pour le rapporter à sa ferme d’origine et découvrir l’autrice des arabesques. Fabien pense pouvoir faire éclore un talent d’importance. Un talent qui donnera du sens à sa vie, et pourra changer leur avenir à tous… Mais rien ne se passe jamais comme dans les contes de fées. Un récit contemporain et intimiste où le regard d’un quadragénaire est bouleversé par la vitalité naïve de sa fille de 5 ans. Ensemble, ils vont découvrir, construire et comprendre les processus de la création artistique et surtout sociale.
I
l y a la vie dont il rêvait et il y a celle qu’il peine à s’offrir. Puis, il y a ceux et celles qui la peuplent et l’aident à oublier le rêve déçu où il se voyait en artiste… sans forcément en avoir l’étoffe !
Damien Marie et Laurent Bonneau reviennent, près de dix ans après Ceux qui me restent, avec un album de la même veine, superbement rempli des riens de la vie.
Damien Marie sait, de petites histoires, en faire des grandes. À travers la vie de ses héros du quotidien, qu’il éclaire d’un jour nouveau, il crée un monde plein de l’ordinarité des choses où chacun peut se retrouver. Les amis qui sont toujours là, un enfant précieux, un métier à la con, un couple qui se perd, l’art qu’il fait marchand et nombriliste ou bien brut et authentique… sont autant de pièces d’un puzzle qui, savamment associées, concourent à la création d’un récit d’une justesse clinique, mais riche d’une grande humilité comme d’une belle humanité.
À l’instar du scénario, le dessin de Laurent Bonneau cultive un réalisme épuré en osmose parfaite avec le propos qu’il illustre, formant ainsi un ensemble d’une cohérence et d’une telle évidence qu’il transporte avec une fluidité impressionnante le lecteur de la première à la dernière planche.
Ceux qui me touchent est de ces albums à côté desquels il serait dommage de passer !
La preview
Les avis
ArvoBlack
Le 22/05/2024 à 20:58:36
D'un réalisme prenant, "Ceux qui me touchent" est à la bande dessinée ce que sont les films de Ken Loach, un scénario dur, très ancré dans la réalité, une réalité qui fait parfois mal, mais aussi avec ces moments de complicité, de magie, de rêves, de projets et d'envie.
Cette œuvre de Marie Damien retranscris de manière humble les envie de Fabien, employé dans un abattoir qui se pose la question du non-sens et l'atrocité de son métier. Par une multitude de coïncidences, il est amené à changer ces projets vers quelque chose qui lui correspond le mieux, le monde artistique dans lequel il a fait ses études à l'époque.
Il ne faut pas s'attendre à un chemin tout tracé, cet oeuvre est très honnête, plutôt noir même si source d'espoir. Le dessin est lui très graphique, j'apprécie beaucoup les traits parfois un peu flou. Le choix d'une couleur par ambiance et lieux d'actions permet également facilement de situer l'action et ou elle se déroule. "Ceux qui me touchent" est une aventure humaine, sensible et humble, j'ai beaucoup aimé.
William_WTR
Le 23/02/2024 à 11:19:03
C'est toujours un plaisir de retrouver le trait de Laurent Bonneau, toujours aussi personnel et efficace. Il est ici au service d'un scénario signé Damien Marie qui vise juste sur une vie difficile à laquelle il est impossible d'échapper. Les injonctions contemporaines à "changer sa vie", "vivre ses rêves", et autres titres d'ouvrages sur le "bien-être" se fracassent sur la réalité du quotidien. La "petite" pique sur le monde l'art-contemporain est savoureuse.
Un album sombre mais qui provoque beaucoup d'émotion, avec une fin plus ouverte qu'il n'y parait... on peut rêver !
Erik67
Le 03/12/2023 à 09:22:03
On va suivre le parcours d'un homme de la France d'en bas qui travaille dans un abattoir de cochons après avoir raté le coche d'une carrière d'artiste. Son épouse travaille également assez durement dans un hôpital comme personnel soignant.
Ils ont eu du mal à avoir un enfant mais le miracle a fini par arriver. Leur fille constitue le point d'orgue de leur vie accaparé par les contraintes professionnelles. Un soir, il invente une histoire à sa fille et le lendemain, par coïncidence, certains éléments du récit fictif arrivent dans sa vie. Il commence alors à se poser sérieusement des questions quand cela se reproduit les jours suivants. Est-ce un message pour signifier qu'il est temps de porter un autre regard sur ce qui nous entoure ?
La résonance sonne comme un conte qui nous dit qu'il faut changer sa vie et faire ce que l'on aime pour trouver le bonheur. Cependant, il va vite être rattrapé par la dure réalité dans un contexte économique difficile pour la France d'en-bas qui galère chaque jour.
La fin de cette BD est tout simplement horrible car il y a une double conclusion : une heureuse et la réalité. Comme dit, la vie n'est pas un conte de fée. Oui, mais si on lit des BD, c'est justement pour s'évader parfois et avoir un message positif et non d'un pessimisme sans nom.
Les auteurs ont choisi une voie qui est à contre-courant. Je n'ai pas aimé mais je salue ce choix assez audacieux. Bref, cela risque de ne pas plaire à tous les lecteurs.