Résumé: Aida Karlsson, une jeune suédoise de quatorze ans, vit à proximité d’une petite ville dans la région du Småland. Elle et ses amies, Tess et Marlène, sont en classe de cinquième et se retrouvent confrontées à de nombreux changements dans leurs relations avec les garçons ; nouvelles règles du jeu, nouveaux comportements, attouchements qui dégénèrent en agressions, relations amour/haine et cette frontière parfois ténue entre les simples jeux d’enfants et la violence... Les trois amies réalisent qu’elles vont devoir s’endurcir pour ne pas perdre leur place dans la nouvelle hiérarchie qui s’instaure dans ce monde où les adultes sont presque perçus comme une menace, un monde où elles ne peuvent compter que sur elles-mêmes.
Dans ce premier livre, publié en 2014 en Suède, Hilda-Maria Sandgren dessine au crayon le récit sensible de ces prémices du passage à l’âge adulte, les rires et les blessures de l’enfance qui ne vont peut-être jamais tout à fait guérir. Elle retranscrit le temps qui s’écoule et ses bouleversements ; cette métamorphose des corps et des caractères reflétée par les changements de la nature au fil des saisons, avec de magnifiques dessins de paysages, les champs, les cours d’eau et les forêts où des drames se nouent parfois...
A
ïda et ses copines, Tess et Marlène, vivent dans la campagne suédoise. Elles font leur vie entre collège, famille et camarades, comme la plupart des adolescentes de leur âge. Leurs relations avec les garçons deviennent ambiguës.
Hilda-Marie Sandgren signe ici son premier album. L’histoire est simple, le quotidien et les faits décrits sans fard priment sur l’expression des sentiments, laissant place à la représentation de la nature, des forêts et de la faune locale, comme autant de métaphores. L’ensemble crée une ambiance tout en retenue et en économie de moyens, également due au dessin brut, un peu brouillon, entièrement au crayon en noir et blanc. Une sobriété caractéristique d’une certaine littérature nordique.
Dans le paysage de la bande dessinée suédoise, le registre de Ce qui se passe dans la forêt lorgne plus du côté d’Åsa Grenvall que de Liv Strömquist. Si ce titre n’est pas vraiment sombre, il s’en dégage une certaine mélancolie, un malaise, à l’atmosphère en demi-teinte à l’image de ce que peut ressentir l’héroïne. Il n’y a pas de jugement, juste un regard porté sur une période particulière de l'existence et le manque de repères typique de cette période où les expériences sont plus ou moins heureuses. Des situations dérapent et certaines, paraissant plus «anecdotiques» et figurant comme banales dans l’intimité du vécu des jeunes filles, sont tout aussi dérangeantes. Le récit montre que dans un pays qui fait figure d’exemple en matière d’égalité, les atteintes aux femmes persistent.
Hilda-Maria Sandgren fait preuve avec Ce qui se passe dans la forêt d’une finesse et d’une sensibilité remarquable dans sa capture d’une adolescence dans toute son ambivalence et de la violence pouvant accompagner la découverte de la sexualité. Cette publication confirme que la scène suédoise est à suivre.