Info édition : Numérotés de 1 à 1000, 1001 à 1050 pour les exemplaires réservés aux auteurs. 50 albums numérotés HC sont réservés aux éditeurs. Un mini portfolio inséré dans un coffret en bois est offert aux 60 premiers acheteurs en ligne.
U
ne lettre, les jambes vous lâchent, tout s’effondre autour de vous, c’est le trou noir, la machine à souvenir se met en marche et le rideau de s’ouvrir. La jeune femme, personnage central de ce premier tome dont le prénom sera tu jusqu’au bout, est train de vivre ce moment où tout ressurgit. Les images reviennent, centrées sur Théo, son compagnon et leur relation que seuls quelques soubresauts semblent encore justifier.
Si le ton peut paraître léger, le fond est plus grave. Certains passages sont plombés par un silence en suspension qui pèse sur l’atmosphère et en dit plus que de longs discours. Le mutisme dans lequel s’enferme Théo est d’une violence inouïe. Mais le récit respire, et c’est ainsi qu’il se trouve ponctué d’instants plus frivoles, à la limite du registre des feuilletons féminins dans ce qu’ils ont de meilleur. Bourrées de petits clins d’œil, de situations cocasses et de phrases bien senties, ces saynètes ont tout pour plaire. Demeure un rythme qui prend le temps de s’attarder sur des détails anodins sans sombrer dans une certaine lenteur, il s’agit plutôt dans le cas présent de torpeur. Petite surprise, un texte* plutôt en décalage avec la surface d'apparence saine de l’ensemble, vient par deux fois servir d’entracte
L’emploi du noir et blanc est en parfaite corrélation avec cette histoire intimiste et le trait de J. d’Aviau en harmonie avec le ton posé du scénario. Il va à l’essentiel et chaque subtilité ressort avec justesse. Le lecteur peut alors s’arrêter à loisir, saisir ces perches et se perdre dans ses propres pensées. Le nombre réduit de cases par page et leur relative grande taille mettent en valeur les visages, notamment féminins, qui expriment le ressenti avec une sensibilité à fleur de peau. Les mimiques, les moues, les grimaces et les minois constituent à eux seuls un dialogue.
A la fin de la lecture, reste un sentiment contradictoire qui n'a rien de péjoratif, d’un côté cette BD aurait pu se suffire à elle-même et dans le même temps, la frustration de n’avoir qu’effleuré les protagonistes se fait sentir. En ce sens, puisqu’il s’agit d’une introduction au récit Théo prévu pour 2008, c’est avec un mélange d’impatience et de curiosité que l’amateur attendra la suite.
* Il s’agit d’une nouvelle J. Incardona.
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