Résumé: “ Un roman noir au soleil. ”
Sud de l’Espagne. Une station balnéaire hors saison, sur la route de Malaga.
Un jeune Français, méfiant, armé, coule des jours solitaires dans une
résidence quasi déserte.
Sa routine est bientôt bouleversée par l’irruption de son passé, et l’arrivée
d’un voisin chaleureux et enthousiaste.
Le jeune homme se laissera-t-il apprivoiser ? Échappera-t-il à ses démons
pour enfin trouver la paix ?
E
xiste-t-il un endroit plus déprimant qu'une station balnéaire hors saison ?
Dans une banlieue de Málaga crépusculaire, à peine éclairée par le soleil rasant, Saïd traine sans but. Il ne côtoie personne, si ce n'est une prostituée de temps en temps. Il se livre à des séances matinales de jogging dans les rues désertes. Sinon, il ne fait pas grand-chose. Par contre, il semble sans cesse sur le qui-vive, à l'affut du moindre comportement suspect. L'Andalousie offre un point de chute facile pour les criminels français en cavale, le temps de se faire oublier de la police ou de complices qui se sentiraient lésés. Le jeune homme n'est pas en villégiature. Il se planque, autant de la police que de ses complices, qui pourraient être sur ses traces. Alors, il attend.
Calle Málaga s'inscrit dans la tradition des thrillers d'atmosphère. A priori, il y a peu à en attendre. Les ingrédients de base sont classiques. Le style semi-réaliste du dessin semble le choix le plus évident. La réalisation se cantonnera-t-elle aux voies balisées ? Pourtant, cet album se démarque rapidement par des choix narratifs audacieux. Privilégiant l'atmosphère avant tout, le scénario est avare en dialogue, offrant par contre de longues séquences muettes qui installent une ambiance pesante. La composition des planches alterne intelligemment le gaufrier classique avec de doubles pages panoramiques qui traduisent élégamment la langueur ambiante. Et, malgré l'économie de textes, les auteurs parviennent à donner une belle épaisseur aux personnages et à mettre en scène leur relation.
Mark Eacersall, qui s'est taillé une petite réputation dans le polar en bandes dessinées et lauréat d'un fauve Polar SNCF, signe une intrigue solide et bien construite. Il a trouvé en James Blondel, dont c'est la première bande dessinée, un complice talentueux. pour une création qui se révèle une bonne surprise.
La preview
Les avis
BMR
Le 03/06/2025 à 14:43:05
De très beaux dessins et une colorisation grandiose : ce sont les images qui racontent l'histoire. Un court récit, comme une nouvelle, l'histoire d'un homme taiseux et solitaire qui erre comme un fantôme dans les rues d'une ville déserte, hors-saison.
Enfant, le scénariste français Mark Eacersall a grandi dans le souvenir de l'atelier de son père qui, le dimanche, peignait d'après des cartes postales d'Espagne. De quoi alimenter son imagination puisqu'il nous invite, avec cet album, dans une station balnéaire hors-saison.
C'est le normand James Blondel qui signe les dessins et la remarquable colorisation de Calle Málaga.
Quelque part en Espagne, Calle Málaga s'étouffe sous les couleurs orangées du soleil, même si l'on est encore hors-saison.
Dans cette ambiance de ville fantôme, erre un jeune homme solitaire. Son visage reste souvent dans l'ombre des éclairages somptueux de Blondel : l'homme seul est comme un spectre dans la ville déserte.
Le gars est un sombre taiseux et on devine bien sûr qu'il est en cavale, qu'il fuit la police et peut-être même ses complices.
Sur le palier de son appartement, il fait la rencontre d'un personnage sympa, un petit gros jovial, un peu envahissant, qui va même l'emmener dans la sierra pour admirer les fleurs du printemps.
L'album est court, le récit également : s'il s'agissait d'un écrit on parlerait d'une nouvelle.
Un personnage ou deux, le décor de la ville déserte, deux ou trois péripéties à peine suggérées, des souvenirs presque, et la chute.
C'est remarquable d'autant que ce ne sont pas les bulles et les dialogues qui viennent envahir ces très belles planches. Mark Eacersall le dit lui-même : c'est « une narration silencieuse, où ce sont les images qui parlent ».
Et puis il y a les planches de James Blondel : une ligne bien claire et très nette magnifiée par une colorisation superbe. C'est sans hésitation, un des plus beaux albums qu'on ait vus cette année.
Alors qu'en reste-t-il une fois l'album refermé ?
« Une nuit à la belle étoile ... avec un ami. ».
Ah, voilà une belle conclusion.