Le 24/07/2024 à 11:40:00
Le chinois Wu Qingsong revient cinq ans après un premier volume publié en VO en 2019 et dont le présent tome suit de près la publication chinoise. Il s’en excuse dans une brève post-face en annonçant le (peut-être?) dernier tome pour l’année prochaine. Au vu des qualités folles des dessins et de la très volumineuse pagination, il sera difficile de le lui reprocher. Sur les planches, si le cadrage plus serré permet moins de visions grandioses, on conserve une qualité graphique de très haut niveau tant dans les décors que dans le design des personnages et des armures, puisque c’était cette originalité esthétique qui faisait du premier volume une magnifique surprise asiatique. Continuant de développer un univers de steam-fantasy (mais sans vapeur), Quingsong nous alimente en continu en Kaiju gigantesques, en peuplades exotiques comme ces hommes-oiseaux et surtout en chevaliers steel-mystiques dont la puissance issue de pierres magiques permet des affrontements titanesques qui rappellent par moment Saint-Seiya (Les Chevaliers du Zodiaque) ou Funerailes. Regorgeant de séquences de combats virevoltants, les deux-cent pages du volume ne sont pas franchement ennuyeuses. Les dialogues restent également très accessibles et bien tournés mais s’orientent résolument vers ce qui apparaît ici le cœur du projet de l’auteur et l’inévitable faiblesse de ces Brumes écarlates: les très complexes jeux d’échec occultes entre factions dans cet enchevêtrement de royaumes aux alliances fragiles. Après avoir fait connaissance avec le groupes de « ronins » qui ont enlevé la princesse, nous voilà lancés dans la quête de la Pierre aux Cinq couleurs, joyau doté d’une énergie mystique absolue qui renvoie les cristaux alimentant les armures des protagonistes au rang d’allumettes. Alors que tout le monde se tombe dessus pour posséder cette pierre, différents émissaires des royaumes dissertent sur leur billard à 25 bandes. Appuyé sur des planches dont toujours appétissantes et aucun problème de rythme, la série est pourtant victime d’une complexité renforcée par l’éternel problème des noms que l’on a le plus grand mal à retenir. L’indispensable carte d’intérieur de couverture, perfectible sur le premier volume, s’élargit ici en nous noyant encore un peu plus dans les interactions entre royaumes. Du coup on suit tout cela avec attention et concentration, mais l’on se perd régulièrement sans trop savoir laquelle des éminences grises nous suivons. Ajouté à cela d’étonnants sauts narratifs, on remercie grandement la sciences du rythme de l’auteur pour nous éviter de plonger. Il est très frustrant de minorer ainsi les très grandes qualités de ce manhua surtout lorsqu’elles sont liées à un genre dont il respect les codes et une langue qui n’a bien évidemment pas à s’adapter au lecteur occidental. On parcourt ainsi un album sans réelles fausses notes, toujours élégant, d’une richesse de background très grande (et illustrée par les pages d' »encyclopédie » qui sépare les parties), mais dont la complexité diplomatique et les mystères nécessitent un certain niveau de concentration, d’autant que l’auteur ouvre plus de portes qu’il n’en referme. Néanmoins très fun, créatif et donc toujours aussi beau, Les brumes écarlates reste une BD exigeante mais fort agréable. A voir si le troisième volume simplifiera quelque peu les interactions et permettra d’assumer un coup de cœur qui n’est pas loin. Lire sur le blog: https://etagereimaginaire.wordpress.com/2024/07/06/les-brumes-ecarlates-2/BDGest 2014 - Tous droits réservés