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n soir que M. Jang rentre chez lui, seul comme presque toujours, il découvre dans le studio qu’il occupe un cafard géant. Plutôt que de chercher à s’en débarrasser, il accepte la présence de l’insecte dans son environnement quotidien, comme une sorte de repère familier, presque rassurant. Et c’est ainsi que débute une improbable cohabitation avec les aléas de la vie à deux.
La solitude amène souvent au cafard. De là à ce que l’insecte prenne forme en tablier pour faire la vaisselle ou le ménage, il y a un pas qu’a su franchir Jang Kyung-Sub. Métamorphose de la pensée qui transforme en cafard à taille humaine un compagnon imaginaire. Kafka n’est pas loin, la réalité non plus : qui n’a pas parlé avec son double en période de grande solitude ? Le petit rampant qui se promène dans toute cuisine et qui a tendance à faire fuir ou au minimum à dégoûter, n’est pas un choix idéal pour attirer le lecteur. C’est un parti pris audacieux de l’auteur dont le Brève cohabitation regroupe plusieurs des récits écrits depuis 1996.
L'humour omniprésent atténue le caractère dramatique de certains passages, souvent issu des préjugés que chacune des deux races prête à l'autre et des conséquences que certains sacrifices impliquent. Le graphisme, qui ne sort pas des codes du manhwa classique, bien entendu en noir et blanc, ne déroutera pas l'amateur de bande dessinée asiatique. Expressivité des personnages et simplicité des arrières-plans, un style sans originalité mais non dénué d'une certaine efficacité.