Le 27/07/2022 à 01:46:26
**À noter qu'au moment où j'écris ces lignes, "Le Bras d'Orion" renvoie à trois entrées distinctes sur BDGest, une pour chaque tome, alors qu'ils devraient tous être rassemblés dans la même série. Une erreur de l'auteur, sans doute.** Lire de la BD indépendante n'est jamais un exercice facile. Un, parce que c'est rarement bon, et deux, parce que si vous l'avez achetée à un kiosque où l'auteur lui-même vous l'a vendue, qu'il était super sympathique et qu'il avait des étoiles dans les yeux en vous parlant de son projet, vous vous sentirez forcément mal de ne pas avoir aimé ce qu'il vous a tendu. Et de ce côté-là, Le Bras d'Orion s'en tire très bien. J'ai été agréablement surpris par l'ampleur du travail accompli ici. Premièrement, le dessin est superbe. L'originalité des cases est parfois surprenante, et la composition et le détail également. Leblanc cite Druillet comme influence en entrée de jeu et on le ressent. J'aime aussi que selon le personnage qui parle, la police de caractères puisse changer. La première page est aussi datée de 1985 (et la fin du tome 2 aussi), mais la date de publication est 2015, signe que Leblanc travaille sa série depuis des décennies... Par contre, l'édition papier que j'ai entre les mains a une piètre qualité d'impression. L'encre sur les pages est souvent floue, ce qui gêne la lecture. Les deux premiers tomes peuvent être lus gratuitement sur le site des éditions Roquefort; c'est probablement l'option à privilégier dans ce cas-ci, mais peut-être que depuis 2015 la qualité de l'impression s'est améliorée. Alors, quel est le problème? Il est clair que Leblanc est passionné par l'univers qu'il a créé. Le résultat est qu'il y a beaucoup trop d'exposition, de narration, d'explications, et peu de mouvement. On dirait plutôt une encyclopédie illustrée qu'une BD. Ou un livre de règles de Donjons & Dragons. J'exagère un peu, mais c'est globalement ce qui s'en dégage. J'imagine aisément Leblanc aller à une convention de BD dans les années 80 et parler avec ses amis de toutes les règles et les races extraterrestres et les vaisseaux qui régissent l'univers du Bras d'Orion. Pourtant, l'écriture est bien ciselée et maîtrisée, mais elle n'apporte pas grand-chose à l'histoire. Histoire classique, de l'aveu d'un personnage lui-même. La femme de Rah est tuée par les Taharquistes de l'Église des Morts, l'une des religions de cet univers, et celui-ci veut se venger du leader qui a un "complexe d'Hérode", c'est-à-dire qu'il a peur du messie -- Rah lui-même. Et c'est le gros de l'histoire. Dans le tome 2, une race extraterrestre vient brouiller les cartes, mais encore une fois trop de bla-bla militaire, trop de présentations des différents commandants et généraux, tout ça pour les voir disparaître quelques secondes plus tard. Leblanc a aussi la fâcheuse habitude de faire dire à ses personnages ce que le dessin dit déjà. Exemple, dans le tome 1 Rah voit la tête d'une femme jaillir du feu et s'exclame : "Qu'est-ce que... Un visage apparaît dans les flammes!" ... Oui, on le sait. Vous l'avez dessiné! "Qu'est-ce que...?" aurait été bien assez. Nul être humain n'irait jusqu'à expliciter la suite, en se la verbalisant ou non. Bref, c'est bien dommage. Leblanc a d'excellentes idées en tête, mais il ne réussit pas à les canaliser pour en faire une BD cinétique qui donne envie au lecteur de tourner les pages. Il y a beaucoup trop de texte qui n'apporte rien à l'histoire qu'on lit. Je crois cependant que le potentiel était là. Si vous aimez ces séries aux innombrables détails, plus thématiques que dynamiques, peut-être y trouverez-vous votre compte avec Le Bras d'Orion.BDGest 2014 - Tous droits réservés