I
l y a quelques années, Aihara Kumi a été manageuse du club de baseball de son lycée. Aujourd’hui, les membres de l’équipe sont abattus un à un par un mystérieux tueur. Quel rôle joue-t-elle dans ce massacre ?
Disons-le sans détour, la principale qualité de Blood rain c’est de nous rappeler les belles heures du « giallo ». Né en Italie dans les années 60, ce genre policier souvent sanglant a inspiré à quelques metteurs en scène certaines de leurs meilleures productions. Comment ne pas se souvenir avec une pointe de nostalgie de certains films à l’esthétique innovante signés Mario Bava (son La fille qui en savait trop en 1963 est considéré comme l’œuvre fondatrice du courant giallo) ou des délires de Dario Argento avant qu’il ne sombre du côté obscur du Grand Guignol et de l’éclairage de discothèque. De celui-ci, jetez donc un coup d’œil à L’oiseau au plumage de cristal (1970) ou à Quatre mouches de velours gris (1971).
Dans leur sillage, d’autres n’ont gardé de ces réussites que les ingrédients-chocs tels les meurtres sophistiqués, les assassins tarés et protégés par la pénombre jusqu’à la scène finale et quelques touches érotiques. Tout cela pour écrire, souvent involontairement, quelques unes des plus mémorables lettres du cinéma bis (voire Z) à l’italienne. Lucrative, la vague s’est ensuite échouée sur les côtes américaines pour « inventer » le slasher, cet exercice chronométré dans lesquels on décime allégrement et le plus souvent à l’arme blanche des groupes de crétins pubères. Avec au passage les compliments des Jason, Michael Myers et autres Freddy pour citer les plus emblématiques.
Mais revenons à Blood rain qui assume pleinement l’héritage de ces courants. Il faut dire que quelques jeunes lecteurs de mangas n’auront peut-être pas ces références en tête lorsqu'ils entameront ce manga. Mio Murao n’a de toute évidence rien inventé en nous invitant à suivre un tueur encapuchonné, une héroïne sexy à la moralité irréprochable dépassée par les évènements, quelques fausses pistes et quelques meurtres perpétrés avec des instruments originaux. Le sommaire de ce tome 1 est d’ailleurs assez savoureux de 1er dégré : Meurtre – Soupçons – Preuve – Traumatisme – Conflit – Stratagème – Machination sont par exemple les titres des sept premiers chapitres.
Le trait réaliste et précis, l’auteur n’hésite pas non plus à dénuder ses héroïnes à la moindre occasion, comme c'est l'usage avec les scream girls indissociables du genre. Au bord de la crise de nerf, c’est souvent sous la douche (!) que celles-ci retrouvent paix et sérénité. Et comme le rideau n’est jamais fermé… Il offre aussi sa dose syndicale de perversité à son serial killer en lui permettant d’infliger une séance de soumission humiliante à Kumi, menacée comme il se doit par une longue et scintillante lame, symbole phallique bon marché. Bref, comme souvent au cinéma, on a plus envie de se marrer en voyant s’enchaîner tous ces poncifs que de frissonner. Il y a des exceptions pourtant. Blood rain, appliqué mais laborieux, n’en fait pas partie.