Le 28/05/2017 à 09:34:42
On sait bien depuis longtemps que la fin de toute saga de Naoki Urasawa nous laissera un arrière-goût de déception, ou tout au moins de frustration, facilement résumée en "tout ça pour ça ?"... "Billy Bat" n'échappe pas à cette triste règle, alors même que je fais partie des gens qui pensent que la saga aurait dû s'arrêter à la fin du magnifique quatorzième volume, et qu'elle évolue depuis dans une sorte de coma artificiel. Pourtant, les dernières pages - parfaites, bouleversantes (avec ce duel / réconciliation entre soldats américaines et russes d'une guerre future) - ont cela de bien qu'elles révèlent pleinement le projet d'Urasawa : non pas écrire un autre thriller fantastique qui se finira forcément en eau de boudin, trop de portes ayant été ouvertes qui ne sauraient toutes être refermées de manière logique / satisfaisante, mais construire un portrait de l'humanité - depuis le Christ jusqu'à la crise environnementale actuelle (qui est au centre de la première partie, assez maladroite d'ailleurs, de ce vingtième tome) - qui lui permette d'affirmer sa vision, mélange complexe de pessimisme (nous n'avons qu'une terre - toutes les autres ayant été "resetées" par Billy Bat - et elle n'est pas dans un très bon état !) et d'idéalisme (il reste toujours quelque chose de bon dans l'homme, même quand tout paraît perdu) pas forcément très original. C'est d'ailleurs dans la célébration généreuse du travail du mangaka (ou du créateur de BD) que l'on trouve les plus beaux messages qu'Urasawa a voulu nous faire passer dans "Billy Bat" : si tout paraît perdu, il appartient à chacun d'entre nous de continuer à faire son boulot, même le plus dérisoire ; et apporter le bonheur à un enfant reste la raison la plus essentielle de continuer à vivre. De ce point de vue, même si Urasawa est encore bien jeune, "Billy Bat" a tout du testament.BDGest 2014 - Tous droits réservés