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ars 2004, deux hommes se rencontrent dans un train en route vers Kosovska Mitrovica, au Kosovo. Ils ne le savent pas, mais quelques heures plus tard éclatera un pogrom. Une fois de plus la haine parle. Dimitri est de retour après une absence de quinze ans, il a refait sa vie en Italie, loin des combats. Il ne serait probablement pas revenu, si ce n’était pour assister aux funérailles de son père. Milan est pour sa part vieux, en manque de repères et un peu désabusé. Une fugitive amitié se noue entre eux. À travers leurs échanges, les auteurs présentent l’histoire récente d’un pays ravagé. Une contrée où Serbes, Bosniaques, Croates, Albanais, Roms et musulmans en sont venus à s’entretuer.
Dans Bienvenue au Kosovo, un album au titre empreint d’ironie, les scénaristes, Nikola Mirkovic et Simona Mogavino, portent un regard cinglant sur les conflits qui se sont succédé alors que les habitants ont longtemps su vivre en bonne entente, malgré leurs différences. Sous une fine trame romanesque se lit un propos didactique sur une réalité à la fois simple et d’une infinie complexité. L’objectif est de toute évidence de raconter cette guerre, ses soubresauts et ses conséquences. Le protagoniste se révèle cependant assez peu attachant ; ses souvenirs et son épopée constituent néanmoins un fil conducteur guidant le lecteur à travers un quart de siècle de tensions politiques dans cet État qui ne s’est jamais complètement remis de la mort du Maréchal Tito et de sa poigne de fer.
Le dessin réaliste de Giuseppe Quattrocchi est en phase avec le projet aux accents documentaires. La reconstitution des décors se montre convaincante et elle traduit toute la violence des affrontements et leurs séquelles. Le jeu des acteurs, particulièrement celui du personnage principal, souffre d’une certaine inertie, à moins que cette atonie ne témoigne de son état de choc. La construction des pages est créative ; les vignettes ont la particularité d’être très distanciées, en plus d’être contenues dans un solide cadre noir. Il en résulte que chacune des cases se détache et que la planche respire, même si la plupart des illustrations sont chargées.
Une entreprise ambitieuse et complexe qui aurait gagné à être accompagnée d’une préface afin que le bédéphile comprenne mieux le contexte sociopolitique dans lequel s’inscrit le récit.
Les avis
Erik67
Le 27/08/2020 à 18:38:53
Nous avons là une bande dessinée qui aborde le conflit des Balkans dans les années 1990 alors que l'action principale est située en 2004 dans un Kosovo à feu et à sang. Un fils revient d'Italie pour honorer la mémoire de son père et assister à son enterrement alors qu'il ne l'a plus revu depuis bien des années.
La couverture ressemble à s'y méprendre à une publicité de Coca-Cola avec ses couleurs rouge et blanc alors que l'image de guerre est assez morbide. On comprendra à la lecture que ce n'est pas une simple coïncidence car des affiches de la campagne « enjoy » couvraient les rues de Dubrovnic alors que les bombardements tuaient des centaines de civils femmes et enfants. Cela a un côté décalé mais d'assez mauvais goût comme pour souligner le décalage entre les sociétés occidentales qui s'amusaient alors que d'autres se faisaient une guerre impitoyable.
Juste avant de commencer ma lecture, j'aborde toujours le message laissé par les auteurs sur la page de garde. On apprendra que le coloriste a fait son travail jusqu'à la vingtième planche car il a eu un grave accident qui ne lui a malheureusement pas permis de continuer. Les auteurs nous demandent de pardonner l'incohérence de style mais je ne l'ai absolument pas senti. Je pense que le poursuivant a fait du bon travail en respectant la ligne conductrice.
J'ai bien aimé la construction de ce récit qui laisse un goût amer. On se rend compte qu'il n'y avait pas de gentils contre des méchants alors qu'une certaine campagne de propagande gagnait toute l'Europe. C'était bien plus compliqué que cela. Cette bd va nous apporter de nouveaux témoignages qui peuvent être assez intéressants pour se forger une opinion.
Pour autant, la conclusion semble dire que les peuples des Balkans n'ont rien à gagner dans des guerres qui les opposent et qui sont orchestrées par des puissances étrangères qui manipulent les masses pour vendre des armes et qui sont les grandes gagnantes. Bref, il faut les laisser tranquille. Pour autant, j'avais eu l'impression que l'intervention des occidentaux était de mettre fin à ce conflit fratricide pour retrouver la paix.
Malgré cette différence de vue avec les auteurs, j'ai bien apprécié cette bd qui nous apporte quelque chose. La paix est une chose précieuse qu'il nous faut conserver sans tomber dans le nationalisme ou les excès de religion.