Pendant la guerre d'Algerie, un capitaine et son petit regiment sont priés de retrouver Messonier et son groupe, disparus mysterieusement. Cela leur fera decouvrir un champ de bataille incompréhensible réparti sur tout un pays, avec le passé et les légendes qui y sont encore bien vivaces.
Giroud sait décrire un pays ravagé par une guerre qui ne veut rien dire. Sans trop de partie pris, il montre comment , à violence gratuite contre terrosrisme, rien n'est possible. Le message pourrait également être aussi que les hommes, completement perdus, n'étaient plus vraiment des hommes, et que, dans cette ménagerie, ceux qui l'étaient restés étaient suspects. Une belle bd typiquement "aire libre", sublimée par les couleurs de lax.
zemartinus
Le 25/02/2008 à 01:06:44
Kabylie, 1957. Le lieutenant Messonier et sa section ont disparu depuis bientôt
un mois. Désertion? enlèvement? attaque des fellagas? retournement de
veste? rebellion? Valera et ses hommes sont chargés de retrouver les
disparus et de faire la lumière sur cette histoire.
L'histoire que Franck Giroud nous sert ici n'est en fait qu'un prétexte pour se
replonger dans les régions montagneuses de l'Algérie en guerre, où son père
a combattu étant jeune. Solidement documenté (Giroud est par exemple allé
sur place interroger d'anciens fellagahs), le récit n'en est que plus fort. On en
retiendra le caractère trempé des différents personnages, l'intensité
dramatique habilement mise en place, la très forte véracité des dialogues, et
surtout la volonté de montrer tous les apsects de la guerre d'Algérie dans
cette région de Kabylie dans un soucis évident d'objectivité, sans poser aucun
jugement de valeur sur personne. Et c'est très réussit.
La force d'Azrayen vient aussi en grande partie de la patte de Lax qui, à
travers un très beau sepia magnifié par des touches de lumières habiles, nous
sert de superbes compositions fourmillant de détails. On passe ainsi de
vertigineuses vues panoramiques à d'autres toutes en longueur, de plans
d'ensemble géniaux à des gros plans qui se fixent sur une action, un
personnage, un visage, le tout laissant une impression de parfaite symétrie,
avec des cadrages habiles et audacieux. Le trait est brisé, hérissé, aussi
chaotique que les décors dépeinds, avec des lignes allongées, exagérées, qui
donnent du mouvement à l'ensemble. Il faut aussi noter l'importance des
premiers et des arrières plans où toute la vie de la Kabylie est mise en scène
; des images rarement au centre de l'action mais qui amènent une ambiance,
des impressions, comme s'il s'agissait des décors naturels du pays.
C'est cette association du trait dur et expressif de Lax et du scénario au plus
proche de la réalité de Giroud qui donne à Azrayen cette envergure, cette
qualité, cette sensation qu'on vient de lire une très grande BD. Et ce n'est pas
qu'une sensation, heureusement.