Résumé: Dans Les Aventuriers de la finance perdue, Chavagneux, spécialiste très sérieux de la finance, et James, dessinateur beaucoup plus rigolot, nous guident sur les chemins sinueux des marais financiers et décryptent en humour les mécanismes de la finance internationale. Après ces 124 planches de gags, si vous n'avez toujours pas compris comment parler à votre banquier... et bah, c'est vraiment que vous l'avez cherché !
C
omment naissent les bulles financières ? Comment grossissent-elles, deviennent-elles hors de contrôle, enflent-elles encore, jusqu’à l’éclatement inévitable et pourtant jugé tellement inattendu ? Par quels mécanismes l’économie spéculative vient-elle ensuite contaminer l’économie réelle ? Et quelle mystérieuse alchimie transmute les pertes abyssales des investisseurs privés en dettes publiques ?
En prenant comme prétexte le procès Kerviel, en le transformant en procès virtuel et symbolique de la finance, les deux auteurs répondent à toutes ces questions et en abordent bien d’autres. À quoi sert un trader ? Une banque centrale ? Une agence de notation ? Comment les paradis fiscaux siphonnent-ils les mannes capitalistiques dans les phases de croissance, puis amplifient les crises par leur opacité une fois le krach survenu ? Et la crise grecque dans tout ça ? Quels systèmes de régulation pour demain ?
Assurément, le thème est vaste, relativement complexe, mais en l’abordant de manière feuilletonesque – l’ensemble fut prépublié en épisodes sur le site du magazine Alternatives économiques – James et Chavagneux évitent l’écueil du trop-plein d’informations vaguement indigeste que le sujet pouvait générer. Et puis, surtout, l’album est ponctué de traits d’humour salvateurs qui donnent un bel équilibre entre l’ironie mordante du discours et la dose de pédagogie nécessaire à la compréhension des enjeux. Il faut dire que la forme choisie – le procès – permet de multiplier les intervenants témoignant chacun de tel ou tel aspect du problème ou le mettant en perspective. Rappels historiques, contexte politique, conséquences sociales, précisions techniques, anecdotes édifiantes, autant de points de vue venant enrichir le propos. Ultime détail au service de cette efficacité didactique, le dessin : une ligne vive et énergique, dans la tradition de la caricature de presse, proche de l’épure – Chaval n’est pas loin parfois –, soulignée par une bichromie en bistre et sable, et une mise en page classique mais efficiente.
À l’heure où les révélations des Panama Papers semblent enfin déciller les yeux d’un grand public habitué au ronronnement consensuel des JT institutionnels, cet ouvrage est un parfait manuel de décryptage des pratiques délétères de la finance internationale.
Les avis
Erik67
Le 12/05/2021 à 08:11:57
Ce n'est pas la première bd que je lis sur la fameuse crise de 2008 qui perdure jusqu'à ce jour. C'est encore un documentaire traité de manière parfois humoristique avec un léger sens de la dérision. le fond est tout de même très sérieux. le message à faire passer également. Il y a un réel effort de pédagogie afin que le lecteur lambda puisse comprendre les mécanismes parfois compliqués du monde des affaires.
Par ailleurs, j'ai bien aimé le graphisme, l'agencement des cases ainsi que la mise en scène sous forme de procès à la finance. Les banquiers sont effectivement sur le banc des accusés ou plutôt leurs traders qui sont alors les parfaits boucs émissaires. Il y aura des passages de témoins à la barre et c'est reparti pour des explications afin de lever le voile.
La lecture fait froid dans le dos surtout quand on travaille pour une grande banque. On se dit que c'est solidement argumenté. L'auteur va jusqu'au bout des choses dans la démonstration pour ne rien laisser au hasard. Ainsi, et je ne le savais pas, la plupart de nos économistes sont des proches des grands milieux d'affaire et donc plutôt prompts à la protection de leurs intérêts financiers. C'est nouveau pour moi car j'avais une autre idée des économistes. Pour autant, il est vrai que sur ce point, l'auteur ne cite aucun exemple.
Mais bon, l'idée des économistes est que nous le peuple, on doit toujours faire des sacrifices pour que le système puisse bien fonctionner. On se rend compte que les hommes politiques qui véhiculent ce genre de programme ne sont pas moralement irréprochables dans leur vie de tous les jours même si c'est légal.
En conclusion, les mécanismes bancaires n'auront plus de secret pour vous à l'issue de cette lecture. N'allez toutefois pas cacher votre argent en Suisse !