C
omme souvent pour l’œuvre de Jason, il est difficile d’en évoquer le contenu, tant l’absurde et le dérisoire y sont conviés à tout bout de champ. Il y sera donc question, en vrac, et de manière non exhaustive, d’Athos en balade à New-York, de savants fous, de gangsters et de Jason himself. Tiens donc ! Alors, est-il l’odieux personnage qu’il met en scène ? Ce n’est sans doute pas là la question qu’il a voulu lever, si tant est qu’il ait voulu en lever une. Peut-être a-t-il plus prosaïquement cédé au plaisir de singer là une des pratiques les plus tendances du moment.
Recueil d’histoires courtes, Athos en Amérique (comprendre « Athos en Amérique & autres histoires ») reprend la forme de Low moon & autres histoires et viendra sagement se ranger à ses côtés dans une bibliothèque, dos toilé contre dos toilé, ainsi que dans l’esprit du lecteur, les protagonistes semblant parfois se balader de l'un à l’autre. Cet album est donc du Jason pur jus, souvent sans queue ni tête, tout en digressions et non-sens. L’ambiance spécifique à chaque scène, ainsi que les cassures, sont insufflées avec sobriété et à-propos par la mise en couleurs d’Hubert, constituée exclusivement d’aplats.
La patte de l’auteur est là, indéniablement, mais cette propension à soigner ses effets au détriment du récit a aussi ses limites, et c’est peut-être dans cette inversion des rôles que se trouve son talon d’Achille. S’il parvient toujours à poser des situations pas croyables avec une économie de moyens ahurissante - une sorte de flegme efficace -, il manque ce lien profond entre les éléments qui place Attends… au-dessus de la mêlée de ses livres. En creusant inlassablement le même sillon, et cela même s’il excelle dans son art, il prend le risque de lasser son lectorat. Il ne s’agit pas pour lui de changer la spécificité du style qui le caractérise, mais plutôt de le soumettre au service d’un tout.