Info édition : Avec un dossier de 9 pages "L"histoire de l'histoire" en fin d'album.
Résumé: Fin des années trente. À Barcelone, un anarchiste est enlevé en pleine rue. Les ravisseurs sont des membres de la police politique de Staline. À leur tête, une certaine Caridad.
Plus tard, à Paris, Sylvia fait la connaissance de Jacques Mornard. La sœur de Sylvia est la secrétaire de Trotsky, exilé au Mexique. Sylvia tombe amoureuse de Jacques, beau jeune homme, journaliste sportif se désintéressant complètement de la politique... Plus tard encore, Sylvia, militante convaincue et active, remplace sa sœur malade auprès de Trotsky. À Mexico où il l'a suivie, Jacques Mornard est désormais Frank Jacson, et il travaille dans l'import-export...
Caridad, Sylvia, Jacson, Trotsky : les personnages principaux de la tragédie sont en place.
Tout est vrai dans ce récit, et tout est faux. Les personnages ont existé, les faits sont établis. Dans le contexte exacerbé de la fin des années trente en Europe, entre la montée du nazisme et le pouvoir totalitaire de Staline, seule la mise en perspective de l'Histoire et le dialogue entre les protagonistes relèvent de l'interprétation de l'auteur. Une interprétation d'une force et d'une acuité inouïes.
F
in des années 30. De Moscou à Barcelone en passant par Paris, la planète est en ébullition. Les révolutions des uns tentent de déborder chez les autres. Le débat d’idées est tendu, prendre position étant souvent considéré comme un crime ou une trahison. Sylvia vient d’accepter le poste de secrétaire de Léon Trotsky, alors en exil à Mexico.
Dans son précédent album, Le roi invisible, Gani Jakupi avait choisi de raconter la vie d’Oscar Aleman, grand musicien de jazz des années folles. Pour Sylvia et ses amants, il a préféré créer un récit imaginaire, mais crédible, autour d’un évènement réel. Tout le monde connait la fin tragique de Léon Trotsky, grand artisan de la révolution bolchevique et, malheureusement pour lui, rival de Joseph Staline. Tout en suivant un savant canevas qui culminera avec l’assassinat du révolutionnaire, Jakupi retranscrit, principalement, l’esprit de l’époque. La politique, évidemment, les différents personnages en parlent beaucoup, prennent position et, chose perdue aujourd’hui, croient aux idéaux. Le ton, parfois un peu trop didactique, reste néanmoins léger, comme ces longues discussions entre amis les soirs d’été. Dans le même temps, presque d’une façon ténue, l’auteur développe l’intrigue principale. Des alliances et des couples se forment, des espions et autres agents secrets passent et disparaissent. Au milieu de cette mêlée, Sylvia sert de lien, autant d’une façon consciente qu'inconsciente, entre les différentes parties en présence. Le rythme peut paraître lent - il l’est sans aucun doute -, peut-être qu'un surcroît d’actions aurait rendu l’histoire plus prenante.
Le style graphique de Jakupi s’accorde très bien avec le ton général. La mise en page est particulièrement soignée et les angles de vue très recherchés. Ce soin accordé à la construction des planches rend la lecture très agréable. Par contre, le trait manque quelque peu de précision, surtout au niveau des personnages, qui, par moments, sont difficilement discernables. Comme pour le scénario, un peu plus d’énergie dans le trait aurait peut-être pu donner d'avantage de pep à l'album . La mise en couleurs, très originale dans son approche art moderne de l'époque, s’accorde parfaitement avec les dessins.
Une chronique dessinée originale, tout à fait plausible historiquement, Les amants de Sylvia est recommandable.
Sur le même sujet :
Le site internet de Gani Jakupi
Les avis
Erik67
Le 21/12/2020 à 11:24:21
Futuropolis est pourtant l'un de mes éditeurs préférés. Cela ne veut pourtant rien dire car chaque oeuvre est unique et toutes ne se valent pas. Là encore, il y avait de quoi faire d'autant que le sujet concernant l'assassinat de Trotsky au Mexique par les assassins à la solde de Staline était intéressant.
En fait, c'est la mise en image qui pêche. Une calligraphie non adaptée associée à un dessin approximatif et des couleurs trop chatoyantes ne m'auront guère captivé. Sylvia ne sera finalement que le faire-valoir pour faire entrer le loup dans la bergerie. J'aurais sans doute aimé voir sa réaction par la suite et j'en suis privé tant le récit s'achève de façon radicale. Staline a encore gagné...