Résumé: La narratrice, c’est l’auteure elle- même. Elle a 15 ans et vit en Indochine avec sa mère, veuve, et ses deux frères. Pensionnaire dans un lycée pour étudier les mathématiques, elle ne rêve que de devenir écrivain. Sur le bac qui traverse le fleuve séparant son lycée de sa pension, elle fait la connaissance d’un riche Chinois. Ils tombent éperdument amoureux et s’engagent dans une relation régit par l’amour et l’argent qui durera un an et demi. Ils se voient régulièrement et ce premier amour fort mais ambigu impose à la jeune fille de faire face à la honte, la peur, la jalousie, et de parvenir à trouver sa place au sein d’une famille où il est difficile de s’affirmer.
A
près avoir rencontré un admirateur sur le quai d’une gare, une écrivaine célèbre se remémore sa jeunesse en Cochinchine dans les années 30. Elle se revoit, adolescente de quinze ans et demi, vêtue d’une robe légère, installée sur le bac traversant le Mékong la conduisant de son lycée à son pensionnat. Ce jour-là, ses yeux s'attardent sur une belle voiture noire et croisent le regard de son propriétaire, un riche Asiatique. Ils discutent, se plaisent. Elle se dit qu’il pourrait l’aider à sortir de la misère et s'offre à lui. Ainsi débute une liaison au rebours des conventions, mais l'initiant à l’ivresse des sens…
Incontournable de la littérature française du XXème siècle, L’Amant a connu le succès dès sa parution en 1984 et a été porté au cinéma par Jean-Luc Annaud en 1991. Cette version ne convenant pas à Marguerite, elle réécrit son œuvre autofictionnelle dans L’Amant de la Chine du nord. C’est forte de sa connaissance des deux textes et d’un voyage dans l’ancienne Indochine que Kan Takahama (Le dernier envol du papillon, Le goût d’Emma, La Lanterne de Nyx) a entrepris d’adapter le roman en manga.
Collant à la trame d’origine qu’elle respecte, l’autrice japonaise apporte cependant sa vision personnelle. Ainsi, comme elle l’explique dans la préface de l’album, elle a fait du « Chinois » un homme dont l’âge n’est pas tellement éloigné de celui de l’héroïne. Par ailleurs, le style indirect libre des dialogues durassiens le permettant, les échanges s’enchâssent adroitement dans les phylactères, tandis que les pensées de la narratrice viennent dériver et peupler les planches en voix-off. De plus, une grande partie de l’écriture s’exprime visuellement et c’est plutôt réussi, du moins en ce qui concerne le couple et la relation amicale avec Hélène Lagonelle. L’attirance et la sensualité s’expriment dans le jeu des regards et la manière de souligner l’expression des sentiments reflétés sur les visages. Seule la propension à l’émotivité larmoyante de l’amoureux transi peut paraître un rien agaçante. En revanche, si le basculement de la mère d’un accord intéressé – elle pousse sa fille dans les bras de celui qui la déflore, espérant en tirer un bénéfice économique – à un désaveu outré s’avère convaincant, la complexité des liens familiaux avec les frères est traitée trop superficiellement. L’histoire est portée par le graphisme doux de la mangaka et baigne dans une atmosphère lumineuse, ponctuée par des ambiances plus intimes lors des scènes se déroulant dans la pénombre des alcôves. Une sorte de fraîcheur s’en dégage qui doit beaucoup au trait fin et doté d’une certaine délicatesse. Le découpage et les cadrages assurent, eux, lisibilité et dynamisme.
Profitant d'une belle édition cartonnée chez Rue de Sèvres, cette adaptation de bonne facture se lit avec plaisir et donne envie de se (re)plonger dans le livre qui l'a inspirée.
Les avis
livressedesbulles
Le 02/11/2020 à 10:15:33
1984 : Sortie de l'autofiction "L'amant" de Marguerite Duras qui fut un succès.
1992 : Adaptation du livre au cinéma par Jean-Jacques Annaud et ce fut aussi un énorme succès.
2020 : Kan Takahama adapte le livre en "manga".
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A 15 ans, une jeune femme blanche d'un niveau social peu élevé étudie les mathématiques dans un pensionnat en Indochine alors qu'elle rêve de devenir écrivain. Elle remarque un jeune homme chinois riche et y voit dans un premier temps une solution pour élever son niveau de vie.
Intense et sensuelle, cette relation deviendra très vite une histoire d'amour.
Jusqu'au jour où.....
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J'avais aimé le film, je n'ai pas lu le livre mais la lecture du manga est intense. On y découvre des personnes moins lisses que dans le film et c'est très réussi. Coté graphisme Kan Takahama nous charme par les paysages, par les scènes sensuelles mais également en faisant ressortir l'intensité de l'expression de ses personnages.
Une très belle lecture qui m'a donné envie de revoir le film et de lire le roman.
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Erik67
Le 27/08/2020 à 18:29:29
Est-ce que Marguerite Duras se retournerait dans sa tombe si elle voyait que son roman a fait l'objet d'une adaptation en manga ? C'est possible mais je dois dire que c'est particulièrement réussi pour toucher un autre public moins enclin à lire des pavés de littérature. J'avais vu il y a fort longtemps le film de Jean-Jacques Annaud mais il ne m'avait guère marqué.
Par ailleurs, au niveau de l'édition, on remarquera un effort pour sa calquer sur le format européen avec par exemple des dessins en couleur et en commençant sa lecture par l'endroit. Bref, c'est très agréable à la lecture car la forme est soignée. La finesse sera au rendez-vous : rien de pornographique !
On va suivre un épisode amoureux dans la vie de cette romancière lorsqu'elle avait 15 ans et qu'elle vivait dans la colonie d'Indochine. C'est vrai qu'on pourrait analyser cela comme un détournement de mineur. Cependant, il convient de se replacer dans les mœurs de cette autre époque où les choses étaient sans doute plus simples. Il y a tout un charme indéniable qui se dégage de ce couple. Et puis, il y a cette fin si nostalgique.
J'ai beaucoup apprécié cette version. Pour une fois, mon épouse s'est ruée sur cette lecture alors que ce n'est pas dans son habitude. Comme quoi...