L
e roi millénaire poursuit sa route en quête d’une réponse à son unique question : pourquoi survit-il quand tous les autres meurent tour à tour ? Ni les suppliques d’une reine stérile, ni les obstacles se dressant devant lui ne peuvent le détourner de son but. Il ira interroger les dieux. Et plus loin encore, s’il le faut.
L’attente n’aura duré que quelques mois avant que la pérégrination à travers la Grèce antique proposée par Mathieu Bablet ne reprenne son cours, au rythme du pas de son héros aux yeux grands ouverts sur un monde qu’il voit à peine, trop empli qu’il est de ses questionnements. D’un royaume que ne tarde pas à embraser une guerre violente à la caverne des Moires, présidant à toute destinée, le récit repense, réinvente, la mythologie, sur un mode empreint de poésie et d’une douce nostalgie. Les jeux douteux des uns, les demandes éplorées des autres, les souvenirs épars qui laissent transparaître la vérité cherchée se succèdent pour parvenir, sans hâte mais sûrement, à un final à l’image du voyage : lent et à peine perturbé par les aléas environnants. Après les tourments de l’esprit et d’une condition inexplicable vient l’apaisement, doux autant que létal. Inévitable, une fois que la leçon distillée au fil des pages a pleinement porté. La promenade réflexive sur l’immortalité et l’essence – le sens - de l’humanité est à nouveau magnifiquement illustrée et mise en couleur par l’auteur. À ses décors d’autant plus majestueux que les perspectives s’en révèlent infiniment variées et, souvent, vertigineuses, répondent des personnages à l’allure et aux traits hiératiques, qui ne gêneront que par leur absence d'expressivité et d'émotion visible - mais n'est-ce pas là aussi un des enseignements glanés par le roi pèlerin ?
Conte philosophique aux accents de légende, Adrastée ressemble à un rêve éveillé qui, s’il s’achève dans la quiétude retrouvée, pourrait bien néanmoins laisser à certains un arrière-goût amer. Tout cela pour… ça ? Et pourquoi pas ?