A
u détour d’une discussion avec des potes, Cléo apprend que son petit ami, Charles, n’est peut-être pas aussi charmant qu’elle le croit. Plus particulièrement, il aurait eu maille à partir avec Farah il y a quelques années. Confronté à ce vieux souvenir, Charles finit par lui avouer l’existence d’un vague incident passablement trivial selon lui. Dans le même souffle, il souligne que c’était des broutilles de jeunesse et que les torts étaient partagés. Oui, ses réactions d’alors n’ont pas été très malignes mais, depuis, il a changé et mûrit. Pas vraiment rassurée par cette explication, Cléo décide de recontacter Farah pour entendre sa version et d’en avoir le cœur net. Serait-elle aveuglée par ses sentiments ? Connaît-elle la vraie nature de son amant ? Le doute et la perte de confiance en soi et envers les autres finissent par hanter la jeune femme : fait-elle fausse route ?
Album intimiste mettant de l’avant l’individu et ses interactions avec les autres, Adieu triste amour est un récit poignant, à la fois intemporel et dans l’air du temps. Intemporel, car Mirion Malle explore l’âme humaine et la façon dont celle-ci se débrouille pour faire la part des choses. Relation amoureuse, choix de vie, la vérité, le mensonge, les différences de ressenti entre les deux sexes, etc., autant d’interrogations universelles qui ont agité les poètes, les militant.e.s et les artistes au fil des âges. Modernité, période post-#metoo et fluidité des genres oblige, Cléo est constamment en ligne et est au fait des dernières avancées du néo-féminisme de l’heure. Résultat des courses, énormément de questionnements et, malgré nombre d'ami.e.s, elle est finalement la seule responsable de ses décisions, même les plus importantes.
Un titre évocateur et référencé, une épigraphe citant Agnès Varda alertent le lecteur sur la teneur des propos qui vont suivre. En résumé, Adieu triste amour n’est pas une bédé d’aventure ou d’humour. Très proche d’un certain cinéma d’auteur – Varda en premier lieu, Eric Rohmer, voire Jacques Demi ne sont pas loin -, la mise en image est directe et sans artifice. Les protagonistes occupent la majeure partie de la scène, ils discutent et échangent autour d’un verre ou par l’intermédiaire de leurs téléphones. De plus, même si les distances ont cessé d’exister (Farah est en France, Cléo vit au Québec), l’autrice montre avec acuité l’importance de la présence physique. Les mots glissent mieux et l’appui ou l’entraide ne peuvent se passer d’une embrassade ou d’un simple petit coup sur l’épaule.
Beaucoup de blabla et de trétrapilectomie (pas seulement métaphorique !), mais surtout immensément d’amour et de gentillesse. Être en accord avec soi-même est crucial, pouvoir l’être sans briser l’harmonie avec son entourage, dans l’écoute et le respect l’est tout autant. Grave et léger, inquiétant et joyeux, Adieu triste amour s’avère être une leçon de vie à la mode d’aujourd’hui des plus pertinentes.