Info édition : Noté "Première édition, premier tirage"
Résumé: Elijah est un journaliste spécialisé dans les « top 5 » sur des sujets de sociétés, assortis de schéma. Quoi que très populaire, sa rubrique est en balance, il doit sortir un Top 5 qui marquera la rentrée. Et pour ne pas louper le succès il planche sur… les 5 choses à ne pas dire à l’autre de son couple. Par exemple : prendre une décision sans en avertir l’autre. Et quand il rentre chez lui, sa compagne lui annonce qu’elle est enceinte. Contrairement à ce qu’ils avaient convenu. Le top 5 d’Elijah prend alors un tour de plus en plus personnel…
G
ros coups de stress pour Élias. Sa copine Emma lui apprend qu’elle est enceinte, alors qu’ils avaient décidé d’attendre avant d’avoir un enfant. Au boulot, la situation n’est pas meilleure puisque le journal où il travaille est en passe d’être vendu à un groupe financier. Pour couronner le tout, Sandra, sa collaboratrice, n’a pas trouvé mieux que de partir en vacances au moment de rendre un projet hyper-important. Quelqu’un aurait un bon mode d’emploi pour s’en sortir ?
Roman certainement auto-fictionnel voire autobiographique, 5 choses à ne jamais lui dire offre un portrait saisissant d’un jeune artiste se fracassant sur les réalités de l’existence : devenir père et se frotter à un monde économique en constante mutation. La piqûre de rappel fait évidemment mal, autant à l’égo qu’aux certitudes. Amateur des mises en abîme audacieuses, Cannizales a habilement mêlé ses différentes réflexions dans une fable à cheval entre confessions et imagination. Le scénario est ponctué d’extraits de la rubrique (5 choses qui …) qu’Élias réalise dans le cadre de son travail. Est-ce que ces mini-guides sont des simples résonances avec ce qu’il vit ou viennent-ils juste se superposer au présent, ajoutant encore plus de trouble à ses questionnements ? Un peu perdu, le héros doit se débrouiller pour faire les bons choix. À cela s’ajoute de nombreux autres fils narratifs comme la dérive exotico-érotique de Sandra sous les Tropiques et les fragments d’un livre de science-fiction qu’Emma est chargée de traduire. Résultat, l’ensemble forme un ouvrage exigeant d’une grande finesse psychologique, mais heureusement nullement abscons, malgré ses continuelles circonvolutions thématiques.
Les aquarelles monochromes de Canizales répondent aux croquis ultra-simplifiés d’Élias. L’auteur prolonge ainsi les allers et retours du concret à l’imaginaire. Le réel est dépeint d’une manière fragile avec des contours un peu flou alors que l’imprimé est net, quasiment synthétique. L’adéquation entre l’histoire et le dessin est admirable de constance et de logique. Ajoutez un découpage ouvert associé à un sens certain de la mise en scène et vous obtenez un album maîtrisé d’une excellente tenue.
Sérieux, plein d’émotions douces et fortes, 5 choses à ne jamais lui dire est un récit abouti qui utilise à bon escient toutes les possibilités de la bande dessinée pour arriver à ses fins.