Info édition : Six pages sur Ban Public en fin d'ouvrage.
Résumé: 1985. Après avoir participé à un braquage, Milan est arrêté par la police. C'est le début d'une longue descente en enfer. Milan supporte mal la promiscuité de la prison, l'entassement, la sensation d'être moins bien traité qu'une bête qui va à l'abattoir. Il va donc régulièrement remettre en cause les pratiques souvent arbitraires en cours dans les prisons. Les révoltes et les bagarres le conduisent au quartier disciplinaire. Sa réputation de mauvais garçon grandit. Milan est constamment conduit d'une prison à l'autre, à son grand désespoir et celui de sa fiancée. Les moments d'accalmies, où Milan arrive à avoir des activités constructives en prison, sont systématiquement mis à mal par ses perpétuels déménagements. Condamné à 20 ans ferme,
Milan trouvera cependant le moyen de calmer sa révolte et finira par être libéré pour bonne conduite quelques années avant la fin de sa peine.
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0 ans ferme, la sentence tombe et Milan se retrouve derrière les barreaux. Il n'est pas tout blanc, le Milan, il le sait. Il a voulu jouer et il a « perdu », il accepte donc son sort avec résignation. Par contre, ce qu'il ne supporte pas, c'est la façon dont la République traite ses prisonniers. Abus, aussi bien physiques que psychologiques, et manquements aux droits élémentaires, à l'intérieur des murs des prisons, la loi est systématiquement bafouée. Qui va entendre sa révolte ?
Sensibilisé par le travail de l'association Ban public, Sylvain Ricard (Stalingrad-Khronika, La mort dans l'âme) a décidé d'apporter sa pierre à cette cause en racontant, en bande dessinée, le sort réservé aux condamnés en France. Se basant sur le témoignage de Milko Paris, le fondateur de Ban public, il a inventé Milan, un prisonnier prêt à tout pour conserver sa dignité d'être humain. Le constat est terrifiant. À part pour une émeute de temps en temps ou une agression de gardien, rien ne filtre vraiment du monde carcéral. Loin de l'image d’Épinal entretenue dans les films de gangsters, la réalité est autrement plus tragique. La liste sans fin des humiliations et des privations endurées par le héros en témoignent. L'administration – la société en fait - semble avoir tout simplement oublié que d'être détenu, ça ne veut pas dire être privé de droits.
La narration, sans faire dans le sensationnalisme, ne va pas pour autant par quatre chemins. La réalité y est montrée sans fard. Milan n'est pas un enfant de chœur, mais il débarque en enfer. Le scénariste présente les faits sans rien cacher et Nicoby (Mes années bêtes et méchantes, Les ensembles contraires) les illustre simplement avec, toutefois, la plus grande précision. Au fil des pages, le courage, la détermination et, surtout, la réflexion du héros deviennent contagieux. Le système est cassé, mais, comme il le dit lui-même, on ne voit pas souvent d'élus visiter les maisons d'arrêts pour vérifier si la loi est la même pour tous.
Plus de dix ans après Paroles de taulards et Paroles de taule, 20 ans ferme contribue à son tour à dénoncer, dignement et rageusement, une situation intolérable. À lire et à faire lire autour de soi.
Les avis
Erik67
Le 01/09/2020 à 17:31:41
20 ans ferme est l'un des meilleurs récits que j'ai pu lire pour expliquer le problème de l'incarcération. Il est clair que la société civile se désintéresse totalement de la question car elle a d'autres préoccupations. A travers l'histoire d'un détenu, on arrive à percevoir toute l'injustice d'un tel système qui brise totalement la personne. En effet, les prisonniers sont traités pire que des animaux et les exemples ne manqueront pas dans ce documentaire. Ils ne méritent pas un tel traitement malgré tout ce qu'ils ont pu faire. Et puis, on mélangera volontiers les tueurs et les voleurs car ce qui n'est absolument pas accepté c'est le révolté contre un système totalement injuste.
En l'espèce, nous avons un voleur qui a arraché des biens à des personnes qui en ont accumulé plus que de raison et qui ne cesse de s'enrichir car ils ont été élevé dans le culte de la possession. Plus ils en ont, plus il leur en faut. Un peu comme ceux qui partent en Belgique ou ailleurs pour ne pas payer l'impôt représentant la solidarité nationale. Bref, je n'ai absolument aucune compassion pour eux et j'en arrive même à comprendre les motivations d'un cambrioleur qui prend sans demander de permission. Attention, comprendre ne veut pas dire accepter. La misère sous toutes ses formes est à l'origine de tous les maux.
Il est vrai que de manière générale, la société repliée sur elle-même, est peu disposée à accorder plus de droits aux prisonniers en leur permettant simplement d'avoir une incarcération décente. J'en ai entendu qui pense qu'on transforme les prisons en Club Méditerranée ce qui est très loin d'être le cas. On rejette en bloc tous ceux qui sont en prison. Il n'y a aucune tolérance et même lorsqu'ils ont payé leurs dettes à la société.
Plus de douche, plus de parloir, plus de considération: c'est la revendication des prisonniers. N'est 'elle pas légitime ? Chaque être humain a droit à la dignité et à la propreté. C'est tellement évident. Face à ces revendications, la réponse est toujours la même: le refus aveugle. L'administration répond par la violence, la hargne, l'humiliation. Pour moi, cette déshumanisation est inacceptable. Il faut revoir le système de fond en comble. Espérons que cette bd apportera la conscience nécessaire. Mais au vu de ce que je vois, ce n'est pas gagné !