Résumé: Keith et Kurt, deux insectes inséparables vivant dans une paisible clairière, ont un rêve : vivre de leur musique néo-gothique. Mais devenir star n’est pas chose aisée. Pas de répit pour autant ! Keith, le leader, impose des entraînements drastiques à son acolyte qui, de son côté, ne pense qu’à manger et à flirter (sans grand succès d’ailleurs). Un plan de carrière s’impose…
S
i Laurel et Hardy avaient été des insectes, ils se seraient appelés Keith et Kurt, et ils auraient essayé de monter un groupe néo-gothique dans leur clairière. La comparaison est un peu osée, je vous l'accorde bien volontiers, mais le coup du grand gringalet et du petit gros, pas forcément plus futé l'un que l'autre, comme duo comique, on ne peut pas dire que ça soit du jamais vu. Pourtant, la recette fonctionne plutôt bien et les histoires de nos deux compères, évidemment moins glorieuses qu'ils ne les auraient souhaitées, font régulièrement sourire. Mais attention ! Vous n'aurez pas droit à une dose de bon rire bien gras : collection shampooing oblige, l'humour est plus proche de Trondheim que de Binet ou Coyote.
Le graphisme, quant à lui vraiment surprenant, confirme l'idée qu'on peut se faire du public cible, c'est-à-dire marquant une nette préférence pour l'Association par rapport à Fluide Glacial. Dans cette veine, 100.000 milliwatts n'a pas trop à rougir de ses références : les personnages, à défaut d'être confondants d'originalité, sont plutôt attachants avec leur maladresse chronique et leur manque de bol récurrent. Et les dialogues, simplistes mais soignés, sont souvent percutants. Il n'empêche, malgré ses indéniables qualités, l'album ne convainc pas entièrement. Il manque peut-être un peu de profondeur dans le propos et d'énergie dans l'art ô combien délicat du gag en une planche pour emporter l'adhésion.
Le plus étonnant, c'est en fin de compte la grande différence entre le scénario de Diego Aranega et le dessin de Jochen Gerner : alors que l'un, sans être déplaisant, est tout de même fort convenu, l'autre se montre vraiment audacieux, à la fois minimaliste et caricatural. C'est certainement dans ce graphisme particulier, relevé des couleurs tranchées de Denis Bernatets, qu'il faut voir le plus grand intérêt d'un album qui, malgré un titre prédestiné, ne fait pas grand bruit.
L'univers de 100.000 milliwatts gagne pourtant à être connu, si seulement les auteurs pouvaient y instaurer un vrai fil rouge et donner encore plus de caractère aux protagonistes. Certains éléments donnent à penser que c'est dans cette direction qu'ils veulent aller. Peut-être est-il tout simplement trop tôt pour juger une série qui n'en est qu'à son Printemps...