Les chevaliers d'Héliopolis 1. Nigredo, l'œuvre au noir

L 'atmosphère est tendue dans la salle principale du temple sacré. Niché en haut d'une montagne au nord de l'Espagne, le lieu abrite la fraternité occulte des Chevaliers d'Heliopolis. Pour faire partie de cette confrérie d'alchimistes, Dix-Sept doit passer l'ultime épreuve qui démontrera sa valeur. Un combat à mains nues et à l'épée. Point d'atermoiement, le dénouement ne se fait pas attendre car le futur membre se débarrasse aisément de son adversaire. Lors de son intronisation, sa véritable identité est révélée : il n'est autre que le fils caché de Louis XVI et de Marie-Antoinette. Maître Fucanelli ne s'est pas trompé sur les qualités de l'apprenti : il est prêt pour sa première mission.

Alexandro Jodorowski est un artiste touche-à-tout qui n'est plus à présenter. Dans cette nouvelle aventure, une uchronie, il imagine un autre destin pour Louis XVII, mort en prison à l'âge de dix ans. Il prend prétexte pour extrapoler à partir d'hypothèses de l'époque qui évoquaient la substitution du Dauphin par un autre garçon. Ce premier tome présente le jeune homme, les conditions de sa conception et de sa naissance pour le moins extravagantes, l'entourage gratiné et les début de sa quête initiatique. Le scénario est dense, très bien agencé entre flash-back et présent. Le mélange de faits avérés (meurtre de Marat, goutte de Louis XVIII) et de mythes (élixir de vie éternelle, cérémonie de la renaissance) fonctionne à merveille. Si l'imagination débordante de l'excellent conteur peut déconcerter au début avec quelques folies (un gorille qui parle, il fallait oser), elle reste cadrée et relativement cohérente. Le héros est audacieux, charmeur, intelligent et loyal à son ordre, en plus d'être doué dans le maniement des armes blanches. Les autres personnages ont leur part de truculence ou de mystère suivant leur appartenance et dégagent chacun de la présence.

Jérémy (Barracuda) s'est d'abord fait connaître en tant que coloriste de feu Philippe Delaby. Son style possède énormément de panache et convient parfaitement à ce genre de récit endiablé : ultra-réaliste, léché, fin. Le luxe et le faste des intérieurs de Versailles, les décors en général, ainsi que les costumes, sont retranscrits avec une précision et une minutie qui captivent d'emblée. Les détails foisonnent dans les grandes scènes aux jolies couleurs, du grand et beau spectacle.

Avec Les Chevaliers d'Héliopolis , le duo talentueux proposent une intrigue brillante et mouvementée sur fond d'ésotérisme et d'Histoire. Un riche cocktail qui se boit comme du petit lait.

Moyenne des chroniqueurs
5.0