Fleur de bambou 1. Les larmes du grand esprit

H orreur ! Malheur ! Un phénomène rare vient de se produire dans la vallée : les bambous fleurissent. Les animaux sont affolés devant ce spectacle, certes magnifique, mais annonciateur d'un terrible désastre : la mort des arbres. Ils n'ont que peu de temps pour s'organiser et sauver leur paradis. Comment faire ? Panda Roux propose une solution, la seule semble-t-il. Selon la légende, le Grand Esprit créateur de la forêt primordiale possède des graines magiques. Accompagnés de la Fouine (volontaire un peu forcé) et de la Fille des Hommes (bien moins féroce que sa réputation), ils vont entreprendre un périple qui s'annonce difficile et dangereux. L'horizon s'ouvre devant eux, promesse d'inconnu. Ce qui est certain, c'est que les épreuves et les rencontres seront déterminantes.

Richard Marazano (Alcyon, Le protocole pélican...) est un artiste prolifique et touche-à-tout. Avec Fleur de bambou, il rajeunit son lectorat en contant avec malice une très jolie aventure animalière. À partir d'un postulat classique -la quête semée d'embûches d'un groupe de compagnons disparates- le scénariste captive d'emblée grâce au trio principal, tout à fait attachant. Les différences de caractère permettent des dialogues propices à des réparties pétillantes et drôles, entre le sage, courageux et ingénieux Panda Roux, et le bavard, râleur et susceptible Fouine. La fillette, en léger retrait dans cet épisode, demeure discrète. Le peu d'informations distillées à son sujet laisse le lecteur dans l'attente, en espérant que le prochain tome s'attardera plus longuement sur elle. Les personnages secondaires qui gravitent autour des trois héros ne sont pas en reste et enrichissent les leçons de vie proposées : solidarité et partage, don de soi et générosité, danger de la bêtise et du profit égoïste, le tout sur fond d'écologie. Pas de ton moralisateur, la conscience fait toute seule son petit bonhomme de chemin.

Cat Zaza possède un style aussi original que son pseudo. Son trait délicat, proche du crayonné, donne un rendu faussement naïf qui se marie parfaitement avec l'univers d'inspiration asiatique. À l'aise dans les décors (montagnes enneigées, étendues forestières), la dessinatrice y immerge un bestiaire varié qui démontre la minutie de son travail. Son talent s'exprime également à travers la palette de couleurs naturelles utilisée : douces, expressives et lumineuses.

Cet album relève le niveau souvent au ras des pâquerettes des bandes dessinées pour enfants. Ni gaga ou nunuche, ni grossier ou violent, il pourra plaire à un large public : les petits se raviront du côté mignon et humoristique du récit, tandis que les adultes apprécieront le degré d'intelligence et l'inventivité du folklore. Tous enfin s'émerveilleront du graphisme plein de fraîcheur. Une belle réussite !

Moyenne des chroniqueurs
8.0