Shi (Zidrou/Homs) 1. Au commencement était la colère...

L ondres, de nos jours : une mine anti-personnel explose dans le jardin d’un fabricant d’armes.
Londres, exposition universelle de 1851 : Jennifer Winterfield rencontre Kitamakura. A priori, aucun dénominateur commun entre ces deux événements ; pourtant, il existe bel et bien et tient en trois lettres : SHI !

S’adonnant sans retenue à l’éclectisme des genres, Zidrou se lance, avec la complicité de Homs, dans la fiction d’aventure et, n’en déplaise à ses détracteurs, c’est encore un succès !

Préférant le crédible au véridique, le scénariste belge entraîne cette fois le lecteur dans l’Angleterre victorienne. À une époque où les femmes se voient réduites à jouer les utilités, Au commencement était la colère fait de leur vengeance le fil rouge des quatre albums de ce cycle initial. Dans ce premier volume, en jouant sur les contrastes, Zidrou met - psychologiquement et contextuellement - ses personnages en place. Un Royaume-Uni corseté dans une pudicité de façade, une gent féminine qui l’est tout autant au propre comme au figuré, des gentlemen tout aussi pervers que machiavéliques, l’injustice élevée au rang de vertu cardinale… le portrait qui est fait de la société anglaise n’est pas à son honneur et seules Jennifer Winterfield et son amie japonaise amènent, pour l’instant, une touche de fraîcheur et de spontanéité à ce lugubre tableau. Pour ce qui relève du domaine graphique, Homs s’exprime pleinement, comme si les lieux ou les protagonistes avaient été créés uniquement pour qu’il puisse les dessiner. Son trait relate à merveille la psyché des individus - même les plus extrêmes - et dépeint un Londres tel que chacun se plait à l’imaginer.

Avec ses ambiances travaillées, sa couleur juste, un rythme et une intensité savamment pensés au travers d’une mise en page et un scénario des plus structurés, Au commencement était la colère se révèle, au fil des planches, comme une indubitable réussite.