Wonder

R enée travaille à l’usine, elle fabrique des piles en banlieue parisienne. En ce début du mois de mai, elle est loin de se douter qu’elle aussi fera sa révolution…

Renée fait partie de cette cohorte silencieuse qui n’a aucune velléité sociale, mais qui goûte insidieusement, et par inadvertance, à la liberté. Par hasard, à l’occasion d’une manifestation, elle découvre un nouvel univers de l’autre côté du périphérique, là où la dictature des intellectuels remplace celle des petits contremaîtres. Ainsi, de Charybde en Scylla, Wonder (c’est ainsi que ses compagnons de lutte la surnomment) va s'adonner aux délices du surréalisme libertaire, donner un sens à sa vie, elle qui avant de pouvoir transformer le monde voudrait d’abord changer.

Pour retranscrire cet itinéraire quasi initiatique, Élodie Durand joue du noir et blanc. Cette dualité symbolise la poussière de manganèse et le blanc virginal de la rosière, deux valeurs cardinales qui cadrent l’existence de la jeune ouvrière. La dessinatrice tourangelle les oppose à la couleur de ses crayons comme s’affrontèrent, à l’époque, deux conceptions radicalement opposées de la société. Mais la transgression sociale qu’opère la jeune femme se matérialise aussi dans la structure même des planches : la rectitude et l’ordonnancement des cases s’estompent doucement pour définir un nouvel espace de création, avant de resurgir à nouveau, pour mieux disparaître... peut-être définitivement.

Simple et avec de belle envolées graphiques, Wonder laisse penser que, le rouge de la révolte désormais aux lèvres, Renée peut enfin décider de son destin....

Moyenne des chroniqueurs
6.0